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La fausse défaite du Front national

Votez Bonobo Arras mai 2012

Le paysage politique laissé par les départementales ne peut que nous laisser amers. Notre peuple souffre, et va souffrir encore plus. D’une part, l’électorat de gauche dégoûté des politiques gouvernementales a largement boudé les urnes, et laissé le champ libre à l’UMP-UDI, d’autre part la mobilisation de l’électorat FN menace lourdement l’avenir. Seule la bonne résistance de la gauche « non socialiste » nous laisse entrevoir un espoir.

Des départementales dans le Nord, on peut retenir plusieurs aspects. Tout d’abord, un effondrement du P « S » à peu près partout sauf dans les cantons lillois et dunkerquois où ce parti est fortement ancré. Ensuite, une victoire de l’UMP-UDI écrasante (avec 26 cantons sur 40), qui emporte le département. Enfin, une formidable résistance du PCF dans les cinq duels qui l’affrontaient au FN, dans des conditions de départ objectivement défavorables. Résultat : pas d’élus FN, ni à Dunkerque, ni à Roubaix, ni dans l’Est du département, du fait de la mobilisation des citoyens. D’une manière générale, alors que le FN était présent partout au second tour, il fait l’union des électorats contre lui et se fait battre.

Tout va bien alors ? Pas si vite. Même s’il n’obtient aucun élu, le FN rassemble dans le Nord au second tour 36,7% (273.000 voix) et talonne l’UMP-UDI (40,7%, 302.000 voix). À comparer au poids du PCF et assimilé (6,7% avec 49.600 voix) et au PS et alliés (111.700 voix pour 15%). Bien sûr, il s’agit de regroupements de second tour, mais dans ce contexte, le FN enregistre tout de même une poussée de 16.700 voix entre les deux tours alors que le nombre d’exprimés diminue de 60.000 voix. Pour le dire autrement, le FN connaît lui-aussi une dynamique d’entre-deux-tours, il n’a pas épuisé son potentiel de voix au premier tour.

Dans le Pas-de-Calais, le second tour a vu de nombreuses victoires de la droite (autour d’Arras par exemple), la résistance plus forte du PS qui garde une majorité relative au conseil départemental, la subsistance du PCF dans deux cantons sur 39, et bien sûr, la victoire du FN dans 6 cantons du Bassin minier.

Dans le détail, on s’aperçoit que nombre de cantons ont été pris ou gardés de façon marginale, à quelques centaines de voix près, voire même à quelques voix près (Arras-1, Douvrin…). Ici, le FN rassemble au second tour 41,5% des voix (211.300) contre 35,6% au premier tour (190.300 voix). En gagnant 21.000 voix entre les deux tours, le FN montre qu’il enregistre une dynamique qu’il ne faut pas oublier pour la suite. Il est, de loin, le premier parti du Pas-de-Calais.

Il ne remporte que six cantons ? Ceux-ci sont groupés sur le Bassin minier, qui témoignent d’un effondrement du système P « S » qui aura duré un siècle. À part le canton de Lillers remporté dans une triangulaire, les autres cantons sont gagnés dans des duels dans lesquels les candidats d’extrême-droite semblent avoir bénéficié du report d’une partie des électeurs de la droite classique qui se sont saisis du bulletin FN pour battre le PS. Tout cela est lourd de menaces pour le Pas-de-Calais, car avec plus de 40% des voix, le FN est en passe de balayer tout l’écosystème politique local. Ces 6 cantons peuvent n’être que l’avant-garde dans la conquête du Bassin minier par les idées racistes et égoïstes de l’extrême-droite. Triste sort pour un Bassin minier d’où sont sorties toutes les solidarités ouvrières et une si grande fierté collective.

Si l’on situe historiquement ces élections départementales, elles achèvent un cycle politique très local entamé avec les municipales de mars 2014. Dorénavant, les enjeux vont se déplacer au niveau des super-régions (décembre 2015) et au plan national (2017). Cela ne signifie pas que les défaites ou conquêtes locales de 2014-2015 n’y ont pas d’importance, mais que les états-majors partisans vont reprendre du poids vis-à-vis des aspects localo-locaux, ne serait-ce que pour le financement des campagnes : on ne finance pas les régionales (a fortiori dans une région de 6 millions d’habitants) comme les départementales (où chaque canton est une unité séparée). Cet aspect technique des prochaines élections va automatiquement centraliser les décisions au niveau des états-majors qui ont… la faculté d’emprunter. Tout aussi automatiquement, cela ne facilite pas l’implication citoyenne que nous appelons de nos vœux. De même, le mode de scrutin, proportionnel à deux tours avec possibilité de passer au second tour à partir de 10% des exprimés, change radicalement la stratégie à tenir, et permet à nos forces politiques d’aller concurrencer durement le P « S » en créant une alternative à sa gauche.

Si l’on élargit la focale à l’ensemble de la future région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, le champ de bataille n’est pas moins brun. La synthèse des résultats sur les cinq départements fait apparaître une extrême-droite à 39,6%, en situation de gagner une triangulaire et d’emporter la région. Dans le détail, le FN gagne 5,4% et plus de 63000 voix entre les deux tours (alors que la participation a diminué dans les cinq départements). Il existe donc un électorat de second tour pour le FN. Ainsi, les résultats du FN lors des départementales ne lui ont pas permis de gagner beaucoup de cantons, mais le mettent en position favorable pour le prochain scrutin des régionales qui se jouera à la proportionnelle et verra très probablement trois gros blocs s'affronter au second tour.

Face à cela, que dit et fait le P « S » ? Il se réjouit d’avoir résisté (localement) et promet de ne rien changer dans les politiques nationales (Hollande-Valls-Macron et consorts). Le déni de réalité dans lequel s’enferme en particulier Valls (qui dit encore « être de gauche », c’est dire !?) entraîne son parti dans la débâcle. Nous regardons avec intérêt ce qui se passe du côté des frondeurs (peu nombreux et encore incroyablement légitimistes) et d’Europe écologie-Les Verts (EELV). Car la conséquence logique du rapport de force politique Extrême-droite/Droite/sociaux-libéraux/vraie gauche est l’injonction à l’unité pratiquée par le P « S ». « Qui osera jouer la division ? » comme le dit Hollande. Voilà le rêve caressé par les solfériniens, que devant la situation où se trouve l’électorat de gauche une amicale pression fasse rentrer dans le rang les amis écologistes voire communistes, au prétexte du péril FN. Je me sentais pleinement solidaire de Hervé Poly, présent sur le plateau de France 3 région dimanche soir, qui dut répondre à plusieurs reprises à son intervieweuse (qui revenait lourdement à la charge) que non, ce n’était pas « la division » de « la gauche » qui avait créé cette situation et qu’il est légitime de se présenter seuls quand on n’est vraiment pas d’accord. Et ce n’est là qu’un avant-goût de ce qui nous attend dans les mois qui viennent. Les appels à l’unité, corollaires de l’appel au vote utile, vont se faire de plus en plus pressants, y compris de la part de gens très bien intentionnés.

Eh bien, il faudra y résister, car si le gouvernement a annoncé qu’il ne changera pas de cap (il aggrave même son cas en annonçant un « contrat unique » de travail qui va encore insécuriser les salariés, véritable provocation), nous n’avons pas de raison de céder notre droit d’aînesse pour un plat de lentilles. La question d’un rassemblement de premier tour avec le P « S » ne se pose pas pour le PG, ce qui n’exclut pas la fusion démocratique au second tour sur la base des résultats du premier, pour ne pas faire de cadeau à la droite et à l’extrême-droite. Nous n’avons pas fait tout ce que nous avons fait depuis 2009 pour nous retrouver sous la bannière en lambeaux des libéraux-sociaux.

Deux remarques en passant. D’abord, pour souligner le décalage entre les résultats du FN et le faible nombre de cantons emportés (6 dans le Pas-de-Calais, 1 dans la Somme, 2 dans l’Oise et 4 dans l’Aisne, soit 13 sur 145 en Nord-Pas-de-Calais-Picardie), conséquence du mode de scrutin à deux tours qui est, pour le moment, défavorable globalement au FN. Mais la prochaine élection sera à la proportionnelle. Ensuite, pour dire ironiquement que la droite va maintenant devoir gérer des départements exsangues où s’applique impitoyablement la politique d’austérité qu’elle soutient et appelle de ses vœux. On va donc la voir à l’œuvre !

J’ai surtout consacré ce billet à parler des résultats du FN, car il me semble que c’est maintenant un sujet incontournable pour nous, la gauche sincère. Il faut admettre que le mouvement de révolte que nous attendions contre le système, contre les inégalités et pour la justice sociale, contre les politiques au service des puissants, pour une autre Europe, s’exprime d’une part par la désertion des urnes, et d’autre part, par un vote de protestation à l’extrême-droite. Comme le dit Jean-Luc Mélenchon, le volcan s’ouvre à droite, vraiment à droite. Le FN fait très habilement campagne sur des thèmes « sociaux » (retraite à 60 ans !) par pur opportunisme, tout en flattant le sentiment victimaire des Français (vis-à-vis de la construction européenne ultralibérale, des élites forcément corrompues et cosmopolites), Français qui sont menacés de déclassement et dépossédés de leur souveraineté collective. Par-dessus tout, le FN est devenu crédible –plus encore que l’UMP – dans le registre sécuritaire et dans celui de l’ordre social. Il existe une forte attente d’un ordre social plus strict de la part de ceux qui triment et ne s’en sortent pas. Et au lieu de tourner le regard vers les ultrariches ou l’optimisation fiscale des multinationales, le FN dénonce les (rares) fraudeurs au RSA et promet de remettre les assistés au travail. Sa rhétorique construit des boucs émissaires, toujours au sein du peuple (l’immigré, le titulaire du RSA…), se rangeant implicitement du côté des gens honnêtes, tranquilles et surtout blancs.

Voilà le phénomène auquel nous sommes confrontés, qui gagne en audience, et auquel nous voulons apporter des réponses de gauche. Le travail est en cours. Pour l’heure, constatons que partout où nous, le PG, pesons, nous sommes unitaires pour deux ou trois, et contribuons à forger l’alternative à Gauche au P « S », comme à Lille. C’est un acquis sûr, que nous voulons généraliser pour refonder l’espoir.

Face à la marée brune, la vraie gauche ne cède pas

Danger à gauche Bd Saint-Michel Paris 2

Maudits soient les commentateurs télé qui répétaient en boucle dimanche soir combien à leurs yeux le Front national avait « échoué » ! Tout cela sur la base des sondages précédant l’élection, ce qui n’a aucun sens. Claire Chazal insistait sur la « déception » de Marine Le Pen, comme si elle présentait non une soirée électorale mais un magazine people. La réalité est toute autre. Ce billet vous en parlera, ainsi que de la participation des camarades du PG à ces départementales, à Lille, Douai et dans le Bassin minier du Pas-de-Calais.

 Ainsi donc, le désastre attendu se réalise sous nos yeux. Le FN est de fait le premier parti de notre région avec 31,85% dans le Nord et 35,67% dans le Pas-de-Calais. Par rapport au scrutin européen de mai 2014, le FN gagne plus de 45.000 voix (446.000 contre 401.000), nouveau record de mobilisation des électeurs (à l’exception de la présidentielle dont le taux de participation était bien supérieur). L’implantation du FN se confirme à Hénin-Beaumont (58% pour le FN le 22 mars 2015, contre 50,25% le 23 mars 2014 pour l’unique tour de la municipale) ce qui traduit une meilleure mobilisation de l’électorat frontiste puisque la participation globale était nettement moindre d’une élection à l’autre. C’est tout le Bassin minier du Pas-de-Calais qui menace de tomber du côté du FN, soit 4 à 8 cantons. D’autres encore, plutôt ruraux (Saint-Pol ou Bapaume) sont également menacés. Un groupe FN au conseil départemental du Pas-de-Calais est donc très probable à l’issu des élections.

Dans le Nord, le FN a réussi à percer à Dunkerque, à Roubaix, et surtout dans la partie Est du département. Ce sont pas moins de cinq duels PCF-FN qui auront lieu dans le Douaisis et le Valenciennois, avec des risques réels que plusieurs cantons passent à l’extrême-droite.  Au total, le FN se trouve au second tour dans 76 cantons du Nord-Pas-de-Calais sur les 78 encore à renouveler.

Et pendant ce temps, l’état-major du P « S » régional reste sourd dans la tempête. Rien n’ébranle ses certitudes. La plupart des élus ou responsables du PS ne voient pas le rapport semble-t-il entre l’effondrement de l’électorat de gauche et la politique de droite menée par le trio Hollande-Valls-Macron – liste non exhaustive. On se lasse presque à égrener toutes les marques de droitisation du P « S » régimaire, envers et même contre sa majorité parlementaire au besoin : loi Macron, soutien passif aux négociations sur le Grand marché transatlantique, obéissance aveugle aux traités européens dont on avait pourtant promis la renégociation, soumission aux multinationales, continuation des politiques pro-nucléaires et anti-écologistes, abandon ou destruction des services publics, néantisation des investissements publics, criminalisation de l’action syndicale, mépris des fonctionnaires, casse de l’Inspection du Travail, culpabilisation des chômeurs, abaissement des collectivités locales et du Parlement, et j’en passe. Devant un tel bilan, c’est le mot même de « gauche » qui n’est plus reçu et compris par nos concitoyens, à qui l’on répète à longueur d’antenne que « la gauche est au pouvoir ».

Ce qui restera comme un mystère historique est la passivité moutonnière des élites roses locales, grandes muettes devant le désastre annoncé, impuissantes devant les fusions de régions inutiles et imposées, devant l’amputation des moyens d’action, etc. Pour en connaître un certain nombre, ce sont souvent d’efficaces techniciens politiques, mais si peu des hommes politiques, au sens qu’ils ne servent plus un projet politique de transformation globale de la société. Je passe très vite sur ce sujet,  ce n’est pas (plus) l’essentiel du moment.

Au milieu de cet océan de brun et de bleu horizon, nous avons tout de même quelques motifs de satisfaction, avec la très bonne tenue de nos candidats dans la métropole lilloise. Lorsque je dis « nos candidats », je parle des camarades du PCF, d’Ensemble, d’EELV et du PG qui ont proposé une nouvelle offre politique sur 4 cantons lillois et celui de Roubaix-2.  Pour la première fois, toutes les forces du Front de gauche et EELV ont passé un accord offensif, clairement dirigé contre les politiques d’austérité, et se sont présentées unies sur l’ensemble de la ville de Lille. Il ne pouvait avoir d’effet tangible qu’à ce prix : s’il n’avait pas concerné tout le territoire lillois, l’accord n’aurait été qu’anecdotique. Au vu de ses résultats, il devient historique ! En moyenne, les Lillois ont accordé 20% à nos couleurs. Pas suffisamment pour se qualifier pour le second tour, mais bien assez pour rêver des suites à donner à ce rassemblement.

Que l’on mesure ce que représente ce rapprochement entre des forces qui ont bien des différences (EELV et PCF) mais qui sous-estimaient leurs points communs. Les candidats « socialistes » du second tour n’en menaient pas large en contactant nos candidat-e-s pour quémander leur soutien. Ont-ils si peu de mémoire qu’ils auraient déjà oublié la manière méprisante dont Martine Aubry a refusé un accord honorable de fusion démocratique au Front de gauche au second tour des municipales de 2014 ? Là comme ailleurs, nous ne donnerons ni logos ni soutien direct. Seul un appel à ne donner aucune voix au FN est lancé, à charge pour les candidats du parti « socialiste » de convaincre nos électeurs qu’ils méritent leurs voix.

Pour le PG, cette élection confirme l’ancrage d’une génération politique principalement advenue aux municipales de 2014, nourrie au lait de l’unité et de l’action. Que l’on songe à Jean-Pierre Houbron à Marquette (canton de Lille-1), assisté du très expérimenté Ugo Bernalicis comme directeur de campagne. À Sébastien Polvèche, dans le canton de Lille-3, qui a fait une formidable campagne avec Stéphanie Bocquet (EELV), Virginie Drapier (EELV) et Thomas Alam (PCF). À Thierry Duel dans le dangereux canton de Roubaix-2…  Bravo à eux et à celles et ceux qui n’ont rien lâché durant la campagne !

Dans le Bassin minier du Pas-de-Calais, le PG était allié dans 4 cantons aux écologistes d’EELV avec lesquels nous partageons une même ambition de renouvellement des pratiques politiques et de transition sociale et écologique du territoire. Dans cette terre profondément travaillée par le FN, les résultats ont été arithmétiquement plus difficiles (de 4 à 6%). Mais des équipes jeunes et indomptables (je pense ici à Guillaume Fournier, conseiller municipal d’opposition de Fouquières-Lès-Lens, et de plusieurs candidat-e-s EELV) gagnent ici leurs galons pour de prochains combats.

Dans le Cambrésis cette fois, toujours acquis à la droite (ô combien encore cette année…), c'est notre camarade Jean-Pierre Desfassiaux qui a été l’un des suppléants d’une liste Front de gauche menée par Jean-Louis Delhaye, conseiller d’opposition historique du PCF à la majorité de droite. Et comme aux municipales, ce sont tout de même 6,8% des électeurs qui ont soutenu le Front de gauche dans ce milieu politique hautement hostile. Même ici, des points d'appui à la résistance à la droite existent.

J’ai gardé le meilleur pour la fin. Il s’est produit une grande première pour le PG régional dans le canton de Douai car, pour la première fois, une liste 100% PG s’est présentée menée par nos camarades François Guiffard et Martine Cherbuis. Le contexte a fait qu’il n’a pas été possible de s’allier avec les PCF et EELV locaux, les camarades ont donc fait le boulot avec entrain dans le cadre d'assemblées citoyennes. Avec une campagne sans gros moyens, sans ancrage clientéliste, parmi une offre politique saturée (PS, EELV, PCF, UMP-UDI, FN) ils ont rassemblé 4,3% des voix, contre 5,4% à EELV et 7,8% au PCF. C’est un événement que je juge considérable car pour la première fois, nous avons pu mesurer l’effet du PG seul en campagne dans le Nord-Pas-de-Calais. Vous pouvez considérer que le résultat n’est pas terrible, je le trouve très prometteur. Sans la notoriété (EELV) ou un ancrage ancien (PCF), nos candidats ont fait des pointes à 7 et même 9% dans certains bureaux populaires de Douai ! L’autre enseignement de ce vote est que la somme des forces du FdG et d’EELV, si elles avaient été unies, aurait dépassé le PS. J’espère que les camarades trouveront dans ces résultats un encouragement pour tenir le terrain et donner des suites  à ce premier défi.

Beaucoup de nos camarades sortent épuisés de cette campagne, car ils ne sont pas des professionnels de la politique qui pourraient mettre en suspens leurs activités pour faire campagne. Ils sont souvent salariés ou étudiants, ont une vie de famille, et sacrifient beaucoup pour défendre des idées généreuses. Ils méritent bien notre respect et notre soutien.

Le second tour des élections départementales aura lieu dimanche. Nos alliés et nous ne sommes pas des poissons rouges, pas de perte de mémoire ! Nous savons bien pourquoi la vieille Lune de l’ « Union de la gauche » avec le P « S » n’est plus possible aujourd’hui du fait des politiques menées aux plans national et européen,  que j’ai rappelées plus haut. La seule consigne que nous donnerons est « pas une voix au FN ! », car les candidats FN sont hors du cercle de la République par leur xénophobie latente ou explicite. Les diviseurs du Peuple, les fabricants de boucs émissaires et faux-nez conservateurs doivent être battus !

Le visage des « solfériniens » de Lille

Nous voilà 48 heures après le premier tour des élections, les listes du second tour viennent d’être déposées. La tension de ces deux jours retombe à peine au moment où j’écris ces lignes amères. Avant de faire un bilan plus large des municipales dans la région Nord-Pas-de-Calais, il faut que j’évoque ici à chaud la situation lilloise.

La liste Front de gauche de Lille emmenée par une jeune tête de liste communiste de 34 ans, Hugo Vandamme, a réuni 3437 voix, soit 6,17% des suffrages. Sur cette liste, le PG était représenté par 10 candidat-e-s dont notre tête de file Sébastien Polvèche. Pour que le tableau soit complet, rappelons que la liste de Martine Aubry (Parti  « « « socialiste » » »[1]) a réuni 34,86% et celle de Lise Daleux (EELV) 11,08%.

Après le premier tour et en urgence, les listes de gauche se rassemblent traditionnellement pour ne pas faire le jeu de la droite ou du FN, en tout cas limiter au maximum l’élection de conseillers de droite ou d’extrême-droite.

Ainsi, dès hier matin, des représentants du Parti  « « «  socialiste » » » de Lille ont reçu une délégation du Front de gauche venu discuter du programme et leur éventuelle fusion en vue du deuxième tour. Avec un résultat de 6,17%, en rapport avec le total des voix de gauche à Lille, nous étions en droit de prétendre à 5 ou 6 élus au conseil municipal. Après une entrée en matière plutôt positive sur les aspects programmatiques qui pouvaient être mis en commun, les émissaires solfériniens annoncent aux nôtres qu’ils leur proposent UNE place au conseil municipal, UNE place pour 3437 électeurs.

Je vous passe les tractations dans le détail car entre temps nous apprenons que EELV vient de signer l’accord avec le PS, logique vu de loin, mais étonnant lorsque l’on sait que Martine Aubry a littéralement viré la délégation écologiste de son bureau lors de leur première entrevue lundi matin… Nous verrons bien ce que EELV a concrètement obtenu du P « « « S » » » lillois.

Après moult allers et retours, les solfériniens proposent au final trois sièges pour le Front de gauche mais, comble de la mesquinerie, demandent de sacrifier la tête de liste Hugo Vandamme qui serait relégué en place non éligible (sans doute pour crime de lèse-tsarine ? « Qu’on lui coupe la tête ! » dirait la Reine de cœur dans Alice au Pays des Merveille). Devant une exigence aussi extravagante et choquante, les négociations sont définitivement rompues. Le Front de gauche ne sera donc pas au second tour de l’élection municipale de Lille.

Quelles conclusions tirer de ces événements ?

D’abord, il faut souligner l’arrogance inouïe des barons solfériniens face à la délégation du Front de gauche, le souci de punir et d’humilier qui transpiraient d’eux. Lorsqu’on propose sans rire UN siège à une liste qui en représente 5 ou 6, on est dans le règlement de compte et pas dans la volonté de conclure un accord honnête. En particulier, il y a là le souci de punir durement les communistes lillois d’avoir osé former une liste du Front de gauche.

Ensuite, il faut parler du mépris témoigné par les solfériniens à l’égard des 3437 électeurs de gauche qui se sont déplacés au premier tour pour élire des représentants du Front de gauche, anticipant la réunion des listes au second tour. Ces électeurs n’ont pas voté pour des listes « inutiles » mais pour créer un rapport de force entre les forces de gauche qui gouvernent. Au final, ils ne seront pas représentés à cause de l’arrogance des représentants du P « « « S » » ».

Enfin, le Front de gauche a fait face de manière unitaire à cette adversité. Nous ne nous vendons pas contre l’abandon d’un camarade qui a tant donné à la campagne. Sachez que Hugo Vandamme est un salarié qui retournera au boulot dès ce mercredi matin, lui, quand les barons solfériniens prendront sans doute quelques jours de repos bien mérités de préférence loin de Lille.

L’attitude méprisante des solfériniens de Lille montre leur vrai visage. Que nos électeurs du premier tour sachent bien que leur cynisme leur fait considérer ouvertement la présence du FN au second tour comme leur assurance-vie. Le PG ne cesse de dénoncer le FN comme le « diable de confort » du système, en voilà un exemple assumé. La présence du FN tient lieu de serre-file pour empêcher toute alternative à gauche d’exister face au PS, elle arrange bien les solfériniens : c’est le FN qui garde le système en bon ordre.

Que l’on se le dise : Martine Aubry n’est pas la femme de gauche, rassembleuse et respectueuse de la diversité dont elle cultive l’image. La majorité qu’elle souhaite donner à Lille doit être soumise et tant pis si elle est amputée d’un secteur trop en phase avec le mouvement social. Aucune voix dissonante n’est plus supportable à la Cour. C’est un signe parmi tant d’autres de la panique qui saisit le parti « « «  socialiste » » » devant le réel agité qui lui échappe de plus en plus, un signe de plus de son ralliement aux hautes sphères dirigeantes pour qui l’intérêt général n’a plus de sens. Le signe final que le parti solférinien a largué les amarres d’avec les couches populaires.

Pour ma part, je répondrai dimanche prochain au choix impossible qui m’est proposé à Lille par un bulletin blanc : ni FN, ni UMP, ni solfériniens.



[1] Le caractère « socialiste » du PS n’étant plus avéré,  nous cherchons des manières d’en parler sans entretenir l’illusion d’électeurs sincèrement de gauche. Ainsi, nous utiliserons désormais des paires de guillemets comme autant de pincettes, suivant l’exemple de Sébastien Fontenelle dans sa chronique hebdomadaire dans le magazine Politis. Au PG, nous qualifions le P « « « S » » » de « parti solférinien » du nom de la rue où il siège à Paris. Cependant, la rue de Solferino à Lille est plutôt surnommée « la rue de la soif » car c’est le lieudes beuveries étudiantes. En un sens cela reste cohérent, tout ce qui commence rue de Solferino finit en gueule de bois.