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Un FN hors de la République

J’ai assisté le 6 février 2014 à la dernière séance du procès opposant Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, dans ce que l’on appelle « l’affaire des faux tracts » de la campagne des législatives de 2012 à Hénin-Beaumont.

Riche journée à Béthune. On le sait, Marine Le Pen est traduite en justice à la demande de Jean-Luc Mélenchon après que des sympathisants FN aient distribué de faux tracts mettant en scène le candidat du Front de gauche à l’élection législative de juin 2012. J’ai pu assister aux deux dernières sessions de ce procès, le 10 décembre 2013 et le 6 février 2014,en compagnie de nombreux camarades du PG venus soutenir moralement notre cause.

Tout d’abord, j’ai découvert ce qu’est un tribunal et son fonctionnement. La justice y est rendue publiquement. Les petits délits et les affaires privées s’y retrouvent exposés sans fard. Le 10 décembre, notre affaire a été traitée après deux autres cas de droit commun relatifs à des faits de conduite sans permis et de violence sous l’emprise de l’alcool. Je crois pouvoir dire que mes camarades et moi-même étions souvent gênés d’assister à ces deux jugements qui disaient avant toute chose la condition des prévenus.

Pour revenir à notre affaire, l’avocat de Mme Le Pen, Me Wallerand de Saint-Just, a déployé à chaque occasion des trésors de ruses. Mines, bombes à retardement, mâchicoulis et chausse-trapes n’ont pas de secrets pour lui, mais en vain. Soulever une question prioritaire de constitutionnalité sur l’application d’un article du code électoral peut être après tout légitime, sauf quand on l’utilise soi-même dans une autre procédure où l’on est dans le camp de l’accusation… Bref, rien n’aura été épargné aux juges de Béthune, ni à la patience de Jean-Luc qui a fait l’effort de venir à deux reprises pour assister au procès, malgré un agenda qui est comme d’habitude très chargé.

Soulignons l’attitude du FN. Marine Le Pen n’est jamais venue aux audiences. Son avocat amuse le tribunal en multipliant des effets de procédure qui sont régulièrement désavoués par les juges. Enfin, tout de même, nous avons pu entendre aujourd’hui les plaidoiries sur le fond.

Je me permets de résumer très brièvement l’argument de la partie civile (nous) : il n’est pas admissible en démocratie qu’un candidat fabrique de toutes pièces un tract qui sera attribué faussement à un autre, sous peine de fausser le débat argumenté. Le citoyen doit pouvoir (c’est vrai tout le temps, mais encore plus en période électorale) faire son opinion sur la foi des documents produits par les candidats. À partir du moment où l’un d’eux crée des faux, c’est tout le mécanisme intime de formation de la conviction qui est enrayé ou dévoyé.

La thèse soutenue par le défendeur du FN est que la production du document incriminé relève de la liberté d’expression. Le lien entre Mme Le Pen et le faux tract ne serait pas établi, et donc la responsabilité de l’accusée ne saurait être mise en cause. D’ailleurs, Mme Le Pen « ne se sent pas concernée » par l’affaire. Quant à ses aveux sur France 3 Nord-Pas-de-Calais disant « j’assume » la responsabilité de ce tract, et annonçant qu’il y en aurait d’autres, il s’agissait pour elle selon Me Saint-Just de « couvrir ses troupes ».

On mesure par là le rapport à la vérité du FN, et son insertion dans le système républicain. Fausser le jugement des électeurs ne pose pas de problème à Mme Le Pen, qui loin de condamner ces pratiques, les a assumées puis s’est courageusement rétractée sur une ligne de défense inepte. Ces gens-là ne reculent devant rien, surtout pas la tromperie. Avis donc aux électeurs ! Le FN ne produit pas des arguments, il distribue de la fausse monnaie électorale. Finalement, l’affaire des faux tracts est un révélateur supplémentaire du caractère anti-républicain de ce parti.

Devant la gravité des faits, le PG invite à s’associer à un appel pour des élections honnêtes http://www.jean-luc-melenchon.fr/arguments/faux-tracts-de-marine-le-pen-appel-pour-des-elections-honnetes/ que je vous incite à relayer sans modération. Il a été rejoint par Pierre Laurent (PCF), Clémentine Autain (FASE), Christian Picquet (GU), Daniel Tartakowsky (LDH), Emmanuelle Cosse (EELV), Annick Coupé (Solidaires), Eva Joly, etc .

Résultat du délibéré le 3 avril prochain.

Contester l’austérité pour défendre notre région

Toujours dans le cadre du débat d'orientation budgétaire au conseil régional, j'ai appelé à contester l'austérité pour défendre notre région et ses habitants.

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Monsieur le Président,

Monsieur le vice-président chargé des finances,

Mesdames et Messieurs les conseillers régionaux,

Je serai bref car vous connaissez notre position de vote depuis hier.

Nous refusons de nous inscrire dans un cadre financier ultra-libéral dessiné ailleurs. Nous avons entendu hier de nombreuses interventions de la majorité faisant assaut d’optimisme. Il est à croire que moins nous avons la maîtrise des événements et plus l’optimisme s’affiche dans l’hémicycle.

Le budget 2014 est quoi qu’on en dise un budget d’austérité, en recul sur les principales politiques de pointe du conseil régional : lycées, développement économique et emploi, santé, apprentissage, culture… Et ce, malgré les retards de la région en matière sanitaire et sociale et malgré un taux de chômage supérieur de 4% à la moyenne nationale. Ce n’est qu’un début au vu des perspectives budgétaires annoncées au plan national.

Je m’adresse ici à la majorité régionale. Notre région serait mieux défendue si vous aviez la volonté de contester l’austérité, notamment en en appelant aux populations. Vous avez fait un autre choix. En refusant d’engager la lutte contre l’austérité dans notre enceinte démocratique, vous lui laissez libre cours à l’extérieur. Il sera bien temps dans six mois de se plaindre de la montée des extrémismes et de la xénophobie. Donnons-nous rendez-vous dans un an pour mesurer le résultat de la « posture revendicatrice » que vous avez annoncée. Comme avoir tort avec la majorité n’est pour nous ni une consolation ni un réconfort, ce sera donc « non ».

Pour terminer, j’aimerais saluer les personnels du conseil régional, du siège ou déconcentrés, dont la tâche va devenir plus difficile au fur et à mesure que les restrictions budgétaires feront leur œuvre. Par la qualité de leur aide et de leur implication, autour des élus comme de nos concitoyens, ils sont notre honneur et nos représentants quotidiens. Qu’ils en soient ici remerciés.

Conseil régional : nous voterons contre le budget 2014

Le 18 décembre, lors de la séance plénière du conseil régional, nous avons mené le débat d’orientation budgétaire. J’ai annoncé et expliqué pourquoi nous voterons contre le budget régional 2014.

REGIONALES-NORDPASDECALAIS-LE PEN

Monsieur le Président,

Monsieur le vice-président chargé des finances,

Mesdames et Messieurs les conseillers régionaux,

Le projet de budget primitif du conseil régional pour 2014 est historique, vous l’avez abondamment souligné, en raison de la première baisse de son budget de fonctionnement. Prévu pour diminuer de 2%, il faut souligner qu’il aurait diminué de plus de 4% si nous n’avions bénéficié d’une providentielle et exceptionnelle récupération de 32,9 millions d’euros au titre de la gestion des Trains express régionaux (TER).

Le budget de notre région est, comme nous le savons, directement lié à celui de l’État. Les vases communicants mis en place sous la précédente majorité, qui a détruit toute autonomie fiscale, donnent aujourd’hui leur pleine mesure. Le changement tant vanté n’y a précisément rien changé. Alors que l’économiste « modélisateur en chef » de la Commission européenne, Monsieur Jan Int’Veld, a publié un rapport en octobre dernier qui évalue à 5% la croissance perdue par la France en trois ans du fait des politiques d’austérité généralisées au plan européen, la majorité parlementaire s’obstine dans cette impasse. Malgré la catastrophe économique et sociale, malgré l’absence de perspectives données à nos concitoyens et aux salariés, malgré la désespérance qui s’installe, le gouvernement Ayrault et ses soutiens continuent une politique d’attrition des budgets publics, et ce en plein marasme économique.

Comme nous l’avons exprimé lors du débat d’orientation budgétaire, cette politique est suicidaire. On ne saurait imaginer une attitude plus à l’encontre de l’intérêt général, surtout lorsqu’elle s’accompagne de nouveaux cadeaux aux entreprises et d’un tour de vis de TVA. Je ne referai pas ici la démonstration de l’injustice et de la toxicité de cette politique budgétaire. Quand tout est subordonné aux politiques de réduction des dépenses publiques, que reste-t-il du projet politique ?

C’est pourquoi Laurence Sauvage et moi-même voterons contre le budget primitif proposé pour 2014. La situation est trop grave pour jouer aux devinettes jusque demain, jour du vote sur le budget.

En cohérence avec le vote des parlementaires du Front de gauche dans les deux Assemblées qui sanctionne d’un refus clair la politique budgétaire du gouvernement, nous jugeons à notre tour les conditions dans lesquelles le budget régional a été élaboré tout simplement inacceptables.

Entendons-nous bien. Notre opposition ne se manifeste pas contre LES politiques régionales en général, nous en soutenons d’ailleurs beaucoup, mais contre le cadre absurde qui les contraindra l’année prochaine, et les suivantes ! Votre synthèse a l’honnêteté de reconnaître que le garrot va être serré plus encore l’année prochaine, et encore plus en 2016. Nous n’en sommes donc qu’au début des sacrifices.

Encore une fois, le problème n’est pas ce qu’a fait la Région, ou ce qu’elle fait, mais ce qu’elle ne pourra plus faire ou ne fera plus, au moment où elle aurait été le plus utile.

Monsieur le Président, Monsieur le Vice-Président, nous ne vous reprochons pas de ne pas faire de magie avec les ressources qui nous sont données. En revanche, nous n’avons pas la même appréciation de ce que vous appelez « une position revendicative » à l’égard du gouvernement. Il nous semble que cette revendication serait mieux entendue depuis Paris après un refus unanime du budget par la majorité du conseil régional. Sinon de cette « position revendicative » ne restera qu’une posture vite oubliée.

Que l’on y prenne bien garde. Le refus de l’austérité se fera entendre d’une manière ou d’une autre. Le peuple agressé par les politiques d’austérité trouvera les voies pour se débarrasser de ceux qui les incarnent et les mettent en œuvre, que ce soit en conscience, par inconséquence ou par paresse. Et ce d’autant plus qu’aucune majorité n’a été élue pour mener cette politique-là, elle n’a donc aucune légitimité.

Il vaudrait donc mieux que le refus de l’austérité soit exprimé par notre calme assemblée plutôt que par des votes de haine. À ceux qui espèrent quelque chose de leurs élus, faut-il offrir le spectacle d’une assemblée régionale qui commence à baisser les bras en pleine tempête ? À ceux qui n’espèrent plus rien de la démocratie ou à ceux qui la haïssent, faut-il offrir de nouvelles occasions de désespérer encore ou de se réjouir ? En conscience, nous disons « non ».